Je dis tue à tous ceux que j'aime
24 Heures,
14 avril 2005
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ROMAN
Touche-à-tout de talent, l’auteur lausannois Olivier Sillig vient de
publier Je dis tue à tous ceux
que j’aime. Rendez-vous aujourd’hui à la Librairie Basta.
Un conteur des
marges
JEAN-LOUIS KUFFER
Les
vrais raconteurs d’histoires ne sont pas nombreux dans le biotope de la
littérature romande, à quelques exceptions près,
tels Corinna Bille,
Jean-Paul Pellaton, Jean-François Sonnay ou encore Olivier Sillig ,
entré en littérature avec un roman de science-fiction,
récemment
remarqué pour une incursion historique intitulée La
Marche du loup, et
qui «remet ça» avec un drôle de polar
poéticofantastique, Je dis tue à
tous ceux que j’aime, qui séduit par son atmosphère
évoquant le
réalisme magique de certains auteurs balkaniques ou
latino-américains.
«J’ai poireauté huit ans avant de
trouver un éditeur pour mon
premier roman», raconte Olivier Sillig
dans son logis du centreville où l’on remarque, en passant, une
étonnante série de petits bateaux de récente
construction — sa dernière
passion, pas loin d’évoquer l’art brut. Revanche
appréciable: publié en
1995 par L’Atalante, Bzjeurd figure depuis 2000 au catalogue SF de la collection Folio.
Personnage peu conforme au type de
l’écrivain romand, Olivier Sillig
a d’abord passé par les Beaux-Arts (il a une patte de
dessinateur «au
vol» qui a laissé de mémorables traces aux cimaises
du CHUV), avant de
se spécialiser dans l’informatique, en passant par une
tournée de
conférences sur Versailles et autres shows
vélocipédiques, que
suivirent divers essais cinématographiques. Quant au goût
de la
narration, il lui est venu en racontant des histoires à ses
filles, en
attendant que, sur le tard, le mordille le goût pour son propre sexe. Telle
étant
l’imprévisible humanité…
Tout cela ne serait pourtant qu’anecdotique si,
par-delà son
talentueux dilettantisme, Olivier Sillig
n’imposait pas, dans ses livres, un univers tout à fait original
et un
art de conteur aux grands pouvoirs d’évocation. La meilleure
preuve en
est son dernier roman paru, Je dis tue à tous ceux que j’aime,
dans
lequel il évoque l’amitié «au bout de la
nuit» d’un employé comptable
du nom d’Axis Gooze débarquant, aux ordres d’une fabrique de
radiateurs
réfrigérants, dans une ville en mystérieuse
mutation, et d’un jeune
ange glauque prénommé Bresel, dont les amours
vénales n’entament en
rien l’aura de pureté.
«Le véritable personnage de ce
roman est la ville dans laquelle il
se déroule», remarque encore Olivier Sillig ,
qui a construit une sorte de labyrinthe onirique dans lequel ses
protagonistes, et quelques comparses, poursuivent une quête de sens
et de complicité affective à laquelle s’opposent de
sourdes forces
d’oppression et de brutalité. Polar aux dehors de rêve
éveillé, roman
d’un impossible amour, nouvelle variation sur le thème ancien du
double
sacrifié: il y a de tout ça dans ce roman trouble et pur
d’un auteur à
surveiller…
Olivier Sillig / olivier.sillig@perso.ch
/ (21) 320 33 22
v 3.12.2007
(V3.12.2007-16.4.2005)